Blackout géant : retour sur la panne électrique qui a paralysé l’Espagne
Le 28 avril 2025, une panne électrique massive a plongé l’Espagne et le Portugal dans l’obscurité vers midi, provoquant l’arrêt soudain de la plupart des activités quotidiennes.
En quelques secondes, environ 15 GW de production d’électricité (soit près de 60 % de la demande à cet instant) ont disparu du système électrique ibérique. La péninsule Ibérique s’est retrouvée isolée du réseau européen continental, déclenchant un effondrement du réseau électrique en chaîne.
Cette coupure géante, l’une des plus graves de l’histoire européenne récente, a duré entre 12 et 20 heures selon les régions, avant un rétablissement complet du courant dans la nuit et la matinée suivante.
Le 17 juin 2025, un communiqué officiel du gouvernement espagnol est venu clarifier les causes précises de l’incident. Contrairement aux rumeurs initiales, les énergies renouvelables ont été écartées des responsabilités.
Le rapport d’analyse désigne en revanche Red Eléctrica de España (REE), le gestionnaire du réseau électrique national, ainsi que plusieurs grands producteurs d’électricité, comme principaux responsables de l’effondrement. Défaut de préparation, mauvaise régulation de la tension et réactions en chaîne mal maîtrisées ont été pointés du doigt.
Dans cet article, on vous explique ce qui s’est réellement passé, ce que dit le rapport officiel, et surtout ce que cet événement nous apprend sur le rôle croissant de l’autoconsommation solaire dans la résilience énergétique.
Définitions clés
Avant de plonger dans les explications, voici quelques définitions simples pour vous aider à mieux suivre :
• Réseau électrique ibérique : c’est le système qui relie l’Espagne, le Portugal et l’Andorre. Il est connecté au reste de l’Europe, mais fonctionne aussi comme une “bulle” indépendante avec ses propres équilibres.• Réseau électrique ibérique : c’est le système qui relie l’Espagne, le Portugal et l’Andorre. Il est connecté au reste de l’Europe, mais fonctionne aussi comme une “bulle” indépendante avec ses propres équilibres.
• Tension (en volts) : c’est la “pression” électrique qui permet à l’électricité de circuler. Trop basse, et les appareils ne fonctionnent plus. Trop haute, et les équipements peuvent griller.
• Fréquence (en hertz) : elle correspond au rythme des oscillations du courant alternatif. En Europe, elle doit rester autour de 50 Hz. Si elle chute ou grimpe trop vite, le système peut disjoncter.
• Délestage : c’est un mécanisme automatique qui coupe volontairement certaines zones pour éviter un effondrement total du réseau.
• Surtension : c’est un excès de tension électrique par rapport à ce que le réseau ou les appareils peuvent supporter. Cela peut provoquer des coupures automatiques de sécurité pour éviter d’endommager les équipements.
Chronologie de l’effondrement du réseau électrique ibérique

Le lundi 28 avril 2025, dans les heures qui précèdent la panne, le réseau espagnol connaît déjà des perturbations inhabituelles. Des fluctuations de tension sont observées dans les jours précédents, et dans la matinée du 28 avril, ces fluctuations deviennent plus intenses que la normale.
À 12h03, une oscillation atypique de fréquence (de l’ordre de 0,6 Hz) est enregistrée, causant d’importantes variations de tension pendant plus de 4 minutes. Le gestionnaire de réseau, Red Eléctrica de España (REE), applique alors des mesures de correction conformément aux protocoles : renforcement du maillage du réseau (bien que limité par la faible demande à cette heure creuse) et réduction du flux d’interconnexion avec la France. Ces actions permettent d’atténuer l’oscillation, mais ont pour effet secondaire d’élever la tension sur le réseau ibérique.
Pendant une vingtaine de minutes, la situation semble revenue à la normale. Mais peu après 12h32, de nouvelles perturbations brutales sont observées. En l’espace de quelques secondes, deux incidents majeurs se produisent dans le sud de l’Espagne, équivalents à des pertes soudaines de production électrique.
Exactement à 12h33 la tension déjà élevée provoque une réaction en chaîne : plusieurs centrales électriques se déconnectent automatiquement du réseau à cause de surtensions incontrôlées, et chaque déconnexion accroît le déséquilibre. En parallèle, la fréquence du système chute dangereusement (descendant aux alentours de 48,0 Hz) et déclenche des délestages automatiques. Quelques secondes plus tard à peine, la ligne à haute tension reliant la France à l’Espagne se coupe pour protéger le reste du réseau européen de la désynchronisation. 5 secondes plus tard, le réseau électrique de toute la péninsule Ibérique s’effondre complètement.
L’Espagne, le Portugal, la principauté d’Andorre et même certaines zones du sud-ouest de la France basculent soudainement dans le black-out total.
Espagne et pays voisins paralysés pendant des heures
Comme vous vous en doutez, l’effondrement du système électrique ibérique a eu des conséquences immédiates.
En Espagne et au Portugal, toutes les régions ont été touchées simultanément, provoquant un arrêt brutal de la quasi-totalité des infrastructures. Vers 12h30, des millions d’usagers se sont retrouvés sans électricité sans trop savoir pourquoi. Les transports ont été particulièrement affectés : les aéroports ont dû fermer en urgence, le trafic ferroviaire national s’est interrompu net, et dans les grandes villes les métros se sont arrêtés, contraignant à des évacuations de rames en plein tunnel.
La signalisation routière a cessé de fonctionner, plongeant aussi la circulation dans le chaos aux heures de pointe. Dans certaines zones, la coupure de courant a perduré jusqu’à 18 heures d’affilée, laissant des foyers sans lumière ni chauffage jusqu’au lendemain matin.

Au Portugal, qui est interconnecté au réseau espagnol, l’impact a été tout aussi total : le pays entier a été complètement paralysé par la panne, subissant le même type d’arrêt des transports, des communications et des services essentiels que son voisin ibérique. La petite principauté d’Andorre, également reliée au réseau électrique espagnol, a, elle aussi, été plongée dans le noir.
En France, bien que le reste du réseau européen ait pu se protéger en se découplant rapidement ce 28 avril dernier, les effets du black-out ibérique se sont fait sentir jusqu’au sud du pays. Par exemple, le réacteur n°1 de la centrale nucléaire de Golfech (en Occitanie) s’est arrêté automatiquement à 12h33 du fait des fortes variations de fréquence causées par l’effondrement du réseau espagnol. Ce mécanisme de sûreté a évité des dommages à l’installation française, mais illustre la propagation des perturbations de l’autre côté des Pyrénées. Certaines localités frontalières du Sud-Ouest ont également subi des microcoupures lors de la déconnexion brutale des lignes transfrontalières.
Malheureusement, cet incident n’a pas été sans conséquences humaines. Au total, 7 décès ont été liés à cette panne géante. 6 ont été recensées en Galice (nord-ouest de l’Espagne) : par exemple, trois membres d’une même famille sont morts intoxiqués au monoxyde de carbone après avoir utilisé un groupe électrogène défectueux dans leur domicile privé d’électricité.
Quelles sont les causes ?
Il aura fallu plusieurs semaines d’enquête pour comprendre les causes du black-out d’avril 2025 en Espagne.
Le rapport technique officiel, présenté 49 jours plus tard (le 17 juin) par la ministre de la Transition écologique Sara Aagesen, met en avant une origine “multifactorielle” de l’incident. Le black-out a été provoqué par « un phénomène de surtensions ayant entraîné une réaction en chaîne », au cours de laquelle des oscillations de fréquence anormales et des déconnexions successives de centrales électriques se sont alimentées les unes les autres. Autrement dit, une série de dysfonctionnements techniques combinés à des erreurs humaines ont empêché le réseau de rester stable face à une perturbation initiale.
Le scénario décrit par le rapport est le suivant :
- en fin de matinée le 28 avril, le système électrique espagnol était particulièrement fragile face aux surtensions, en partie à cause d’une capacité insuffisante de contrôle de la tension sur le réseau.
- Le jour J, un outil crucial – le système de régulation automatique de la tension – était indisponible en raison d’un « défaut de programmation », ce qui a fait que la tension n’a pas pu être corrigée correctement lorsque les premiers signaux anormaux sont apparus.
- En parallèle, plusieurs anomalies avaient déjà été détectées la veille (27 avril) et le matin même de la panne : des variations de tension inhabituelles avaient alerté les centres de contrôle dès 9h du matin le 28, et des appels avaient été passés pour signaler ces fluctuations préoccupantes.
- Lorsque l’oscillation majeure de 12h03 s’est produite, le gestionnaire REE a bien tenté de compenser, mais certaines de ses mesures ont aggravé le stress du réseau sans qu’on s’en rende compte sur le moment. La réduction du lien avec la France et le remaillage ont diminué l’oscillation, mais augmenté la tension globale, rapprochant le système de son point critique.
- Finalement, à 12h33, la tension déjà trop élevée a poussé de nombreuses unités de production hors de leur plage de fonctionnement autorisée, entraînant leur arrêt automatique pour protection. Ces arrêts en série ont provoqué de nouvelles surtensions (parce que la puissance en excès n’était plus absorbée), qui ont fait tomber d’autres installations, créant un effet domino.
- Simultanément, le déséquilibre entre production et consommation a fait chuter la fréquence électrique bien en dessous de la valeur normale de 50 Hz, si bien que l’Espagne et le Portugal ont perdu la synchronisation avec le reste de l’Europe.
C’est ce mélange de surcharges de tension et baisse de fréquence qui a abouti à la désynchronisation et à la coupure des interconnexions avec la France, puis à l’effondrement général du système électrique ibérique en l’espace de quelques secondes.
❌ Des fausses pistes ont été écartées au cours de l’enquête. Par exemple, l’hypothèse d’une cyberattaque malveillante a circulé sur les réseaux sociaux dans les heures suivant la panne, tout comme l’idée qu’un excès de production d’énergie solaire aurait pu déstabiliser le réseau.
Le rapport officiel ne retient aucun indice d’origine cyber : aucune trace d’intrusion informatique n’a été trouvée, même si l’enquête a identifié des vulnérabilités de sécurité dans le réseau qui devront être corrigées pour l’avenir. La surproduction solaire n’est aussi pas directement mise en cause : les parcs photovoltaïques n’ont pas été fautifs, ce qui a été confirmé par la suite par les acteurs du secteur.
Les zones d’ombre qui subsistent concernent surtout l’origine première des oscillations de fréquence (pourquoi sont-elles apparues ce jour-là de façon si aiguë ?) et l’identité précise des installations de production qui se sont déconnectées en cascade de manière inappropriée (le rapport n’a pas divulgué le nom des centrales ou entreprises impliquées, par souci de confidentialité).

Défaillances en série : quelles responsabilités ?
Le rapport gouvernemental sur ce black-out d’avril 2025 met donc en évidence une série de défaillances tant du côté de l’opérateur du réseau que du côté de certains producteurs d’électricité.
Pour faire simple, plusieurs acteurs n’ont pas accompli leur rôle correctement pour éviter cette crise. La ministre Sara Aagesen a ainsi rejeté la faute à la fois sur Red Eléctrica (REE), le gestionnaire du réseau national, et sur plusieurs entreprises privées de production d’électricité.
D’un côté, REE est critiqué pour une mauvaise planification de ses moyens de contrôle et de réserve. Selon le rapport, l’opérateur avait initialement demandé à dix centrales thermiques d’être en veille, prêtes à intervenir pour stabiliser la tension en cas de besoin. Or, l’une de ces centrales s’est déclarée indisponible la veille de la panne.
REE a fait le choix de ne pas la remplacer, estimant que neuf centrales suffiraient en secours. Ce choix a laissé le système avec une capacité de réglage de tension dynamique insuffisante ce jour-là. En effet, quand la tension a grimpé, les neuf centrales de back-up (des centrales à cycle combiné pour la plupart) se sont révélées incapables d’absorber toute la puissance réactive excédentaire comme elles auraient dû le faire dans un contexte de surtension.
La ministre explique que « les unités de production censées contrôler la tension n’ont pas absorbé toute l’énergie réactive qu’elles étaient censées absorber lorsque la tension était élevée ». En clair, ces centrales (essentiellement des moyens synchrones comme des centrales nucléaires, hydroélectriques ou à gaz) n’ont pas freiné la hausse de tension comme prévu et ça a aggravé la situation. REE a donc sous-estimé les besoins et mal configuré son plan de marche en n’ayant pas assez de “tampons” de tension disponibles, une erreur stratégique majeure.
De l’autre côté, le rapport pointe du doigt le comportement de certaines entreprises d’électricité (non nommées publiquement). Il est reproché à certains producteurs privés d’avoir déconnecté leurs installations de façon inappropriée, dès les premiers signes de surtension, dans le but de protéger leur matériel. Ce retrait volontaire de centrales pour sauvegarder des équipements est jugé « incompatible avec les bonnes pratiques » en période de crise, car il a privé le réseau de précieuses sources d’inertie et d’ajustement au pire moment.
D’autres générateurs n’auraient tout simplement pas suivi les consignes du gestionnaire : alors qu’ils étaient rémunérés pour assurer la régulation de la tension, ils n’ont pas fourni le soutien attendu au moment critique.
Et le gouvernement espagnol dans tout ça ?
Le gouvernement espagnol a donc conclu à une chaîne de responsabilités partagées. Il faut souligner que le document d’enquête rendu public a été partiellement anonymisé sur demande de certains acteurs du secteur, preuve de la sensibilité du sujet. Officiellement, la ministre n’a pas désigné de bouc émissaire unique lors de la présentation du rapport. Elle a aussi annoncé que des mesures disciplinaires ou judiciaires pourraient être prises, via les procédures appropriées, à l’encontre des parties ayant failli à leurs obligations.
La présidente de REE, Beatriz Corredor, a été particulièrement mise sur la sellette dans le débat public, d’autant qu’elle avait initialement défendu que le gestionnaire du réseau n’avait aucune responsabilité – une position contredite par les conclusions du rapport.
Du réseau national à l’autoconsommation individuelle
Face à la gravité de cette mégapanne, les autorités espagnoles ont annoncé un ensemble de mesures pour renforcer la résilience du système électrique. Dès juin 2025, le gouvernement a imposé un audit technique complet aux gestionnaires et producteurs d’énergie afin d’identifier les failles à corriger.
Un plan d’action en 11 points a été présenté, incluant huit mesures portant sur l’exploitation du système (procédures d’urgence, réglages de protection, etc.) et trois mesures relatives à la cybersécurité du réseau. La ministre Sara Aagesen a insisté sur le fait que ce rapport doit servir d’« outil d’analyse, mais surtout de levier d’action », avec pour ambition de « renforcer ce qui fonctionne et revoir ce qui peut être amélioré ».
Côté énergies renouvelables, cet évènement a conforté la nécessité de poursuivre la transition énergétique tout en investissant dans la fiabilisation des réseaux. Les acteurs du solaire et de l’éolien, rapidement mis hors de cause dans cet incident, ont appelé à accélérer les investissements dans la résilience du réseau, la souplesse du système électrique et le déploiement massif de batteries de stockage.
Avant même le black-out, le marché espagnol avait d’ailleurs commencé à aller dans ce sens : en 2024, l’Espagne n’avait installé que 250 MWh de batteries supplémentaires (principalement de petites batteries domestiques), contre près de 9 GW de solaire neuf la même année.
Consciente du retard en matière de stockage, l’Espagne visait déjà à rattraper ce gap : en 2025, le pays devrait entrer dans le Top 5 européen des marchés du stockage d’énergie, grâce à une nouvelle vague de projets de batteries à grande échelle.
Que faire face aux blackout ?
Cet effondrement du réseau électrique ibérique a mis en évidence la fragilité des grands réseaux interconnectés, même dans des pays industrialisés.
Sans verser dans l’alarmisme (de telles pannes restent fort heureusement rares), ça permet à chacun de réfléchir à sa propre résilience énergétique. En effet, quand le réseau tombe en panne sur tout un pays, les particuliers équipés de solutions d’autonomie énergétique s’en sortent généralement mieux que les autres.
Avoir chez soi des panneaux solaires en autoconsommation couplés à un système de stockage (batterie) peut permettre de maintenir un minimum d’électricité pour les usages essentiels lors d’une coupure générale pendant quelques heures.
Par exemple, en plein jour, une installation photovoltaïque autonome bien conçue pourrait continuer à alimenter certains appareils domestiques de base, et une batterie domestique chargée pourrait prendre le relais au moins partiellement pendant la soirée ou la nuit suivant le black-out.

C’est une forme d’assurance énergétique qui prend tout son sens face à un événement extrême comme celui d’avril 2025.
D’ailleurs le pays avait déjà engagé un vaste mouvement vers l’autoconsommation solaire bien avant cette panne. Le pays a adopté en 2018 des lois favorisant l’installation de panneaux solaires chez les particuliers et les entreprises, et a fixé un objectif ambitieux de 15 GW de puissance solaire en autoconsommation d’ici 2030.
En France également, ces questions de résilience et d’autonomie énergétique commencent à prendre de l’ampleur. La catastrophe d’avril évitée de justesse du côté français (avec l’arrêt préventif de Golfech) a rappelé que personne n’est totalement à l’abri d’une panne géante.
Développer l’autoconsommation solaire et les solutions de stockage chez soi fait partie des réponses d’avenir pour disposer d’un filet de sécurité lorsque le réseau faillit – tout en contribuant à la transition écologique de manière proactive (autoconsommation et résilience vont de pair).
Le black-out en Espagne de 2025 aura au moins eu le mérite d’accélérer la réflexion sur la façon de provoquer un changement positif : des réseaux plus intelligents, flexibles et robustes, et des citoyens acteurs de leur énergie, afin que plus jamais une panne n’ait l’ampleur de celle d’avril 2025 !
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